Que reste-t-il
Chacun, Chacune, souffre à sa dose,
s’écoute, se raconte et s’éteint
doucement,
sans soubresaut.
Chacun, chacune, prenant la pose,
s’écoute, se raconte et s’éteint
lentement, sans conviction.
Que reste-t-il de nos colères ?
Nos fantaisies, nos bonnes manières
Chacun, chacune, dans son écran
s’enflamme, sort les griffes et renonce
bruyamment,
sans pudeur
chacun, chacune fait son boucan
s’enflamme, sort les griffes et renonce
Que reste-t-il de nos colères ?
Nos fantaisies, nos bonnes manières
chacun, chacune, paupière mi-closes
envisage, dévisage et s’efface
discrètement
sans éclat.
chacun, chacune, souffre à sa dose
envisage, dévisage et s’efface
—- sans bataille
Que reste-t-il de nos colères ?
Nos fantaisies, nos bonnes manières
Que reste-t-il Que reste-t-il
–
Avant l’abri
Je ris et je cours sous la pluie,
je ris de la distance qu’il reste à parcourir
jusqu’à l’abri anti-chimique.
Je ris, je cours mes cheveux fument
et la peau de mes joues se décollent avant l’abri anti-chimique.
Je l’savais mais j’vous jure mes enfants j’y croyait pas vraiment
j’ai pourtant bien coupé l’eau chaque fois que j’me brossais les dents.
ça suffit pas, ça suffit pas, ça suffit pas , ça pas suffit !
Je ris en creusant la terre,
je ris de la distance qu’il reste à faire
avant l’abri anti-nucléaire.
Je ris dans la terre qui tourne à la boue,
le son des cloques à pustules qui claquent
avant l’abri anti-nucléaire.
Je l’savais mais j’vous jure mes enfants j’y croyait pas vraiment
j’ai pourtant bien dis non à la guerre et chauffer la yourte au soleil
ça suffit pas, ça suffit pas, ça suffit pas , ça pas suffit !
Je cours devant la brigade des vautours,
je ris de la distance à parcourir
jusqu’à l’abri anti-fachiste.
Je ris, je cours avec une vieille envie
de m’retourner une dernière fois, et finir au combat !
Plutôt qu’à l’abri anti-fachiste.
j’les ais pourtant bien vu se relever ces bras tendus
j’ai pourtant bien dis autour de moi : ça pue, c’est moche !
ça suffit pas, ça suffit pas, ça suffit pas , ça suffit pas !
–
Les nuits trop courtes
Les nuits trop courtes, les jours sans fin
et les repas qui n’en finissent pas
l’été trop chaud, l’hiver trop sombre
et le printemps qui ne vient pas
l’été trop court, l’hiver trop blanc
et nos rêves qui se finissent là
Odeurs trop fortes, claquements de portes
les cris quand ils ne faudrait pas
douleurs de l’un, frayeurs de l’autre
Tout comme des brûlures sur mes mains
l’acide en bouche, étouffe nos pleurs
et mon automne qui est déjà là
les causes perdues, les bons conseils
tout ça se perd dans mon sommeil
ne plus parler, ne plus répondre
allez faire un tour plus loin
–